lundi 9 mai 2016

Un jour glacé en enfer

Auteur : Anne B. Ragde
Edition : 10:18
Parution : 2 octobre 2014
Genre : Littérature nordique

Résumé : Peut-être n'est-ce rien d'autre que lui, ce meneur de chiens rustre et glaçant, qu'elle est venue chercher dans ce chalet perdu au milieu du Grand Nord. Cet homme aux mains violentes et au désir brut, presque bestial, qui la fait trembler sous sa fièvre en fendant son corps de plaisir. Mais à force de passion et de soumission, le rapport de force s'intensifie entre les deux amants. Jusqu'au jour où l'un d'eux doit sauver sa peau...

   J'avais envie pour cette lecture de sortir de ma zone de confort, et j'ai été servie pour le coup. Je n'ai pas pour habitude de me diriger vers des auteurs nordiques, bien que ça m'arrive de temps en temps. J'avais d'ailleurs déjà chroniqué un roman du finlandais Arto Paasilinna sur le blog, La douce empoisonneuse. Mais la couverture de ce roman me tentait bien (y a de la neige, et j'aime la neige) alors je l'ai pris.
   Le roman ne promet pas une belle histoire au lecteur. Il raconte quelque chose de dur, intense, et parfois même dérangeant.

   Le plus dérangeant, à mon sens, c'est l'absence d'identité des personnages. Ils ne sont désignés que par des "Il" et "elle", "l'homme" et "la femme", ce qui empêche le lecteur de s'attacher à eux, de les connaître, de s'identifier. On ne connaît ni leur prénom, ni ne savons à quoi ils ressemblent.
    J'avais une petite idée de ce à quoi pourrait ressembler la femme, en l'identifiant comme la femme sur la couverture du roman : une femme blonde, très blanche, le type nordique stéréotypé, fine mais assez forte pour endurer la dureté de la vie dans une ferme glacée avec des chiens de traîneau et un homme bourru et dominant. Elle a une volonté de se démarquer, de montrer qu'elle est forte, qu'elle n'est pas "comme toutes les autres bonnes femmes" qu'il trouve sur le bord de la route. Elle est très débrouillarde, elle montre qu'elle peut survivre et se débrouiller toute seule dans cette immensité glacée, seule avec une vingtaine de chiens.
   En revanche, je n'arrivais pas à mettre un visage sur l'homme, ce qui est tout aussi bien, sachant à quel point j'ai détesté ce personnage. Il n'a que quelques mots dans son vocabulaire : "chiens" "traîneau" "courses", il ne connaît que ça, et il n'y a que cela qui l'intéresse. C'est un homme rustre, qui vit beaucoup trop seul avec ses chiens, sans avoir beaucoup de contact avec l'extérieur, à part certains autres éleveurs de chiens de traîneau et les filles qu'il trouve sur la route et ramène chez lui pour l'aider et rester un moment, avant de repartir. Il n'a aucune considération pour quiconque d'autre que lui-même : il élève des chiens non parce qu'il aime ces animaux mais parce qu'ils lui servent, et qu'ils le servent. Il se permet de "prendre" la jeune femme partout et quand il le désire, sans se préoccuper de ce qu'elle peut ressentir. Il se moque d'ailleurs allègrement des sentiments des autres, et la dénigre lorsqu'elle laisse des larmes la submerger. Elle-même a quelques facettes de sa personnalité que je n'ai pas apprécié, surtout dans la deuxième partie du roman. Elle devient beaucoup plus dure, comme si la personnalité de l'homme déteignait sur elle. Au bout d'un moment, elle commence même à avoir les mêmes mimiques, les mêmes expressions, que lui.
   Après réflexion, je dirais même que mes personnages préférés sont les chiens, et c'est sans équivoque.

   Mais alors si je n'ai pas aimé les personnages, pourquoi ai-je fini le roman ? J'aurais pu abandonner ma lecture, après tout. Ce qui m'a fait continuer, c'est la plume d'Anne B. Ragde. C'est une plume qui colle bien à l'atmosphère du roman et à la dureté de l'histoire : elle est sèche, brutale, froide, parfois vulgaire, elle n'hésite pas à employer des mots crus, et pourtant, elle est très poétique dans les moments où le roman s'y prête. Les descriptions des paysages sont magnifiques, elle décrit les couleurs du ciel qui se reflètent et se mêlent au scintillement de la glace et la clarté de la neige. Ce qui m'a fait continuer également, c'est que, malgré la dureté et même parfois, la cruauté de cette histoire, au point que je devais parfois refermer le livre quelques instants pour me remettre, je voulais absolument voir comment le roman allait se terminer, parce que je n'en voyais pas vraiment de fin définitive : chaque chapitre n'est qu'une suite de petites actions de la vie quotidienne dans une ferme avec des chiens de traîneau, avec quelques grosses péripéties entre. La fin m'a paru n'être qu'une boucle qui se bouclait et qui recommençait, comme si l'histoire se répétait, et ne m'a pas vraiment convaincue.

   Finalement, ce roman me laisse un sentiment bizarre. Je ne peux pas dire que j'ai aimé l'histoire, mais je me suis beaucoup impliquée dedans quand même. J'ai complètement été happée par cet univers tout en ressentant un certain dégoût des personnages. Si vous n'êtes pas trop adeptes des histoires trop dures, de personnages tels que ceux de ce roman, je ne vous conseillerais pas ce roman de cette auteure. J'ai tout de même envie de lire d'autres de ses romans, car j'ai aimé sa plume aussi brûlante du froid de la neige du grand Nord.

   Je vous souhaite d'excellentes lectures, et à bientôt dans une prochaine chronique !

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